Durant le 3ième congrès des médiations à Angers, Marie-Hélène Bergoni a assisté à plusieurs temps d’échanges centrés sur les défis sociétaux majeurs. 

Du 12 au 14 mars 2025, près de 650 participants ont exploré ensemble le rôle croissant de la médiation dans des contextes de vulnérabilité. 

Cette plénière a permis un dialogue riche entre juristes, médiateurs et acteurs du handicap, autour de la notion d’égalité réelle et des solutions concrètes que la médiation peut apporter.

Participants à la plénière

  • Fabienne Jegu, modérateur / Conseillère experte handicap autonomie auprès du Défenseur des droits, également responsable du suivi de l’application de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées. Juriste spécialisée en droit du handicap, auteure de plusieurs ouvrages et rapports, notamment le Guide Emploi des personnes en situation de handicap et aménagements raisonnables (2017/DDD) - France ;
  • Luc Heimendinger,  intervenant / Médiateur (conflits et projets), coach, superviseur, formateur et facilitateur en cercles et systèmes restauratif - France ;
  • Véronique Ghesquiere, intervenan / Cheffe de service Politique et Monitoring à l’Unia - Licenciée en Psychologie et Pédagogie à l’Université Libre de Bruxelles - responsable du Service Politique & Monitoring à Unia, le Centre interfédéral belge pour l’égalité - coordonne la Cellule CDPH d’Unia qui est également le mécanisme indépendant pour la Belgique de suivi de la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées - Belgique ;
  • Philippe-André Tessier, intervenant / Président de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec - Québec.

Les aménagements raisonnables : définition et cadre juridique

Le texte de référence en lien avec le handicap est la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH).

Elle a pour objet de: 

  • promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales des personnes handicapées sur un pied d’égalité avec les autres
  • interdire toute discrimination en raison d’un handicap
  • protéger les personnes en situation de handicap grâce à une égalité de traitement.
Dans ce cadre, « l’aménagement raisonnable » consiste à adopter des modifications en fonction des besoins d’une situation donnée pour que la personne bénéficie de tous ses droits et vise à garantir une égalité réelle. Cependant cet aménagement ne doit pas engendrer des changements disproportionnés sans être des aménagements à minima. 
  • En France le terme « aménagement raisonnable » n’est pas dans la loi car il sous-entendrait une accessibilité au rabais. Cependant ce terme est introduit dans le code du travail et s’applique dans tous les domaines. 
    Au niveau des acteurs de terrain, les employeurs ne sont pas très réactifs face à ce principe. Cette notion doit être bien expliquée, notamment par le défenseur des droits. En 2016, un guide a été créé pour expliquer l’aménagement raisonnable.
  • Au Québec, il existe une obligation d’accommodement raisonnable. 
    C’est une obligation juridique, applicable dans une situation de discrimination, et consistant à aménager une norme ou une pratique de portée universelle, dans les limites du raisonnable. Elle accorde un traitement différentiel à une personne qui, autrement, serait pénalisée par l’application d’une telle norme. Les domaines concernés sont ceux de l’emploi, des services publics et privés, du logement et des actes juridiques.
    Ces aménagements dépendent de la situation et ne permet pas de généralisation.
Inclusion

Les questions à se poser sont les suivantes : 

  • Est-ce que cet aménagement est une contrainte excessive pour la structure en termes de ressources matérielles, financières ou humaines ?  
  • Quel est son impact sur la productivité et la charge de travail des collègues et le fonctionnement de l’entreprise
  • A-t-on proposé un aménagement bon également pour les autres collègues, pour leur santé mentale, pour le reste des salariés ou les élèves, étudiants… ? 

Souvent l’avis « c’est trop compliqué » arrive très vite. Le médiateur peut faire comprendre que l’aménagement n’est pas aussi compliqué que ça.

Cinq étapes sont nécessaires à la mise en œuvre de l’aménagement :

  Recueillir la demande et les besoins de la personne ;

  Analyser cette demande ;

  Rechercher conjointement une solution ;

  Mettre en commun ces réflexions et décider de l’aménagement ;

  Suivre cet accommodement.

C’est là que la médiation a tout son sens.

Pratique et perspectives internationales

  • En Belgique, 2003 est l’année de la première loi anti-discrimination dans des domaines assez larges tels que l’enseignement, l’emploi …
  • En Suisse, la loi cite les mots « d’aménagements raisonnables », ainsi que ceux » d’égalité, accommodement, adaptation ». Elle donne aux personnes en situation de handicap les mêmes droits qu’à toute personne. Elles ont un droit indéniable à l’égalité des chances et à l’autonomie. 

Pour concevoir ces aménagements, il est nécessaire de partir des besoins des personnes, puis de voir quels aménagements mettre en place et ensuite seulement comment les réaliser.  

Un enjeu collectif et technologique

Une attention particulière doit être apportée aux besoins non exprimés par la personne en situation de handicap, comme dans le cas d’enfants polyhandicapés. Leurs parents comprenant le mieux les besoins de leurs enfants sont les porte-parole d’une parole non exprimée et doivent trouver la meilleure solution pour eux. En médiation, ces dossiers sont souvent complexes, notamment en raison du côté émotif et d’un sentiment d’injustice ressenti par les parents.  La médiation permet alors une zone de dialogue sécurisée et elle est une source de créativité.

  Clé de la réussite
Lier les aménagements raisonnables à leurs contraintes et leurs avantages permettrait d’en tirer tous les bénéfices et d’en rendre tous les acteurs responsables.

Grâce aux moyens technologiques actuels, les aménagements peuvent se faire plus facilement et servir à toutes les personnes. Ce ne sont pas des aménagements individuels mais collectifs au bénéfice de tous. Toute la société s’en enrichit.

Marie Hélène BERGONI,
Médiatrice et Vice-présidente de MDPA.